«Au nom de la terre», bouleversant drame paysan, franchit le million d’entrées

    «Au nom de la terre», dans lequel Guillaume Canet incarne le père agriculteur du cinéaste, remporte un succès surprise qui survient deux ans après celui de «Petit paysan».

      « Au nom de la terre » ou la descente aux enfers de Pierre, éleveur d’agneaux, incarné par Guillaume Canet.
    « Au nom de la terre » ou la descente aux enfers de Pierre, éleveur d’agneaux, incarné par Guillaume Canet. PROD.

      La barre symbolique du million d'entrées a été franchie ce week-end. Premier long-métrage d'Edouard Bergeon, « Au nom de la terre » est le succès surprise du cinéma français de ce début d'automne. Sorti le 25 septembre, le film narre la descente aux enfers de Pierre, éleveur d'agneaux, marié et père de deux enfants, happé jour après jour par la spirale de l'étouffement financier. Un personnage inspiré par le propre père du réalisateur et incarné par Guillaume Canet, également coproducteur.

      Tandis que sa femme, Claire (Veerle Baetens), comptable, tente avec son salaire de maintenir un niveau de vie à peine suffisant pour sauver les apparences, Pierre se laisse convaincre d'augmenter encore la surface de son exploitation pour se lancer dans l'élevage intensif de poulets. Las ! Seul Jacques, son père (Rufus, implacablement juste) serait en mesure d'aider le couple à boucler ses fins de mois. Mais il est vent debout contre les choix de son fils. Pierre s'enfonce alors dans la dépression, laissant sa famille impuissante devant son désespoir…

      Plus fort que Will Smith !

      Un drame, miroir des difficultés actuelles du monde agricole, qui n'avait pas, sur le papier, l'allure d'un favori du box-office. Il y avait eu pourtant un signal avant-coureur : les plus de 500 000 entrées enregistrées en 2017 par « Petit Paysan », d'Hubert Charuel, un autre fils d'agriculteur. Un éleveur laitier (Swann Arlaud) y refusait d'abattre ses vaches à la suite d'une épidémie. Le film avait remporté trois César.

      Le succès d'« Au nom de la terre » creuse le même sillon. Certes, il avait bénéficié d'un joli lancement sur 437 écrans, signe qu'il y avait des raisons d'y croire. Mais sans imaginer que ce drame paysan dépasse, en deuxième semaine, cette moissonneuse-batteuse d'entrées qu'est Will Smith, héros du film d'action « Gemini Man ».

      Des «chiffres hallucinants » en milieu rural

      « Depuis la sortie, nous allons de surprise en surprise », observe Christophe Rossignon, producteur du film et lui-même fils d'agriculteur. L'une d'elles est la répartition des entrées. « A Paris intra-muros, nous sommes très moyens », reconnaît-il en s'étonnant que les plus « intellos » des médias y aient vu « un tire-larmes » et trouvé ridicule que Guillaume Canet se fasse la vraie tête du père d'Edouard Bergeon, calvitie incluse.

      Mais dès le périphérique franchi, la musique n'est plus du tout la même. La banlieue enregistre de meilleurs résultats. Les grandes villes de province font encore mieux. Les villes moyennes, un carton. Quant aux salles en milieu rural — un millier sur le territoire — elles ont été prises d'assaut. « On y enregistre des chiffres hallucinants ! confirme Edouard Bergeon. Dans les plus petites salles, il faut réserver sa place. »

      La terrible fin et la décision d'intégrer de vraies images du père du cinéaste pouvaient laisser présager un bouche-à-oreille contre-productif. « Je l'ai craint, confie le réalisateur. Et en fait, je reçois des centaines de messages venus du monde agricole, qui trouve ce final d'utilité publique. »